La Suède miniaturise l'amplificateur optique et promet un Internet 10 fois plus rapide
Des chercheurs suédois révolutionnent les télécoms avec un amplificateur sur puce 10 fois plus puissant. Une innovation qui va transformer Internet et la médecine de précision.

Une équipe de chercheurs de l'université de technologie de Chalmers vient de réaliser une percée majeure dans le domaine des communications optiques. Leur nouvel amplificateur sur puce offre une bande passante de 300 nanomètres, soit dix fois plus que les dispositifs actuels, ouvrant la voie à une révolution dans les télécommunications mondiales.
L'innovation qui brise un plafond de verre vieux de 35 ans
Depuis l'invention de l'amplificateur à fibre dopée à l'erbium (EDFA) en 1987, la bande passante des amplificateurs optiques stagnait autour de 30 nanomètres. Cette limitation technique représente aujourd'hui un véritable goulot d'étranglement pour les infrastructures de télécommunication, alors que le volume mondial de données pourrait doubler d'ici 2030 sous la pression de l'IA, du streaming et des objets connectés.
Les amplificateurs optiques jouent un rôle crucial dans les communications longue distance, compensant les pertes de signal qui peuvent atteindre 99% sur 100 kilomètres de fibre optique. Mais leur bande passante limitée et leur tendance à générer du bruit parasite constituent des obstacles majeurs à l'évolution des réseaux.
Une architecture en spirale gravée dans le nitrure de silicium
L'équipe dirigée par Peter Andrekson exploite les propriétés non-linéaires du nitrure de silicium pour créer un amplificateur révolutionnaire. Le dispositif repose sur une architecture sophistiquée de guides d'ondes en spirale, comprenant 22 boucles interconnectées gravées avec une précision nanométrique.

Cette géométrie tridimensionnelle optimise la circulation de la lumière tout en minimisant les pertes. Le principe physique exploite l'effet Kerr, un phénomène non-linéaire permettant l'amplification paramétrique continue. Contrairement aux EDFA traditionnels, cette approche maintient un rapport signal-bruit exceptionnellement élevé, jusqu'à 70 dB, avec un facteur de bruit remarquablement bas de 1,2 décibel.
La plateforme technologique, développée progressivement depuis 2015, permet de créer des guides d'ondes ultra-compacts avec des pertes record de seulement 1,4 dB par mètre. Les récents progrès dans les techniques de fabrication ont permis d'atteindre des facteurs de qualité de 19 millions.
Des applications bien au-delà des télécommunications
L'impact le plus immédiat concerne les opérateurs de télécommunications, qui pourraient multiplier par dix la capacité de leurs réseaux existants sans remplacer l'infrastructure de fibre optique. Cette amélioration s'avère particulièrement précieuse pour les communications spatiales, où la moindre perte de signal compromet la transmission.
Mais le potentiel de cette technologie s'étend bien au-delà. En ajustant la conception des guides d'ondes, l'amplificateur peut traiter la lumière visible et infrarouge, ouvrant des possibilités inédites pour l'imagerie médicale haute résolution, la chirurgie laser de précision et le diagnostic précoce de pathologies complexes. Un seul système laser pourrait servir simultanément en microscopie, holographie et caractérisation de matériaux.
La miniaturisation sur puce présente également des avantages économiques considérables. Plus compact et économe en énergie que les amplificateurs volumineux actuels, le dispositif peut être dupliqué facilement grâce à sa conception modulaire. La fabrication utilise des procédés CMOS standard, garantissant une production industrielle à grande échelle.
Des performances validées en laboratoire
Les premiers tests démontrent une conversion de signaux au-delà de 100 Gbit/s sans amplification du signal et de l'onde idle. Cette performance, validée sur une puce de 0,56 mètre de long, suggère des gains encore plus importants avec des dispositifs plus longs.
L'amplificateur de Chalmers ne se contente pas d'améliorer les télécommunications : il démocratise l'accès aux technologies laser avancées en réduisant leur coût et leur encombrement. Les chercheurs envisagent désormais l'industrialisation de cette technologie, avec des partenaires industriels déjà intéressés par les applications en spectroscopie et métrologie optique.
Cette innovation suédoise pourrait bien représenter pour l'internet ce que le transistor a été pour l'informatique : une révolution silencieuse aux conséquences immenses.
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