Altice claque la porte aux prétendants de SFR
Altice rejette l'offre de 17 Md€ d'Orange, Bouygues et Free pour SFR.

Orange, Bouygues Telecom et Free ont proposé 17 milliards d'euros pour racheter SFR. Réponse d'Altice : non, immédiatement. Derrière ce refus sec se cache une équation financière complexe et des attentes bien supérieures de Patrick Drahi.
Un refus cinglant pour une offre jugée insuffisante
Arthur Dreyfuss, PDG d'Altice France, a confirmé dans un message aux salariés avoir "immédiatement rejeté" l'offre conjointe déposée le 14 octobre 2025. Pas de négociations, pas de discussion : la porte s'est fermée aussi vite qu'elle s'est ouverte.
Les trois opérateurs proposaient 17 milliards d'euros pour les actifs télécoms métropolitains de SFR, avec une valorisation implicite totale pour Altice France dépassant 21 milliards. Un montant qui peut sembler conséquent, mais qui ne répond manifestement pas aux attentes du groupe de Patrick Drahi.
Pour Altice, cette première proposition ne répond pas aux attentes stratégiques et financières du groupe, encore fragilisé par une dette dépassant les 15 milliards d'euros. Le message est clair : si vous voulez SFR, il faudra mettre bien plus sur la table.
La dette colossale qui dicte les conditions
Pour comprendre ce refus, il faut revenir à la situation financière d'Altice. Le 4 août 2025, le tribunal de commerce de Paris a validé le plan de restructuration de la dette du groupe, permettant de la réduire de 24 milliards à 15,5 milliards d'euros. Une bouffée d'oxygène obtenue au prix de concessions majeures.
Patrick Drahi a dû céder 45% du capital d'Altice France à ses créanciers, dont le fonds américain BlackRock, tout en conservant une participation majoritaire de 55%. Ces créanciers ne sont pas des philanthropes : ils attendent un retour sur investissement.
Altice a déjà réduit sa dette de 8,6 milliards d'euros, mais reste endetté à hauteur de 15,5 milliards.
Les créanciers ont déjà encaissé 2 milliards d'euros issus de cessions d'actifs stratégiques, notamment la vente du pôle médias (BFMTV, RMC) pour 1,55 milliard et celle des datacenters pour 535 millions. Ils attendent désormais la suite du processus de désendettement, avec des échéances qui pointent à l'horizon 2028-2033.
Dans ce contexte, accepter une offre à 17 milliards pour l'essentiel des activités télécoms reviendrait à brader le principal actif du groupe. La valorisation implicite totale pour Altice France, incluant l'ensemble des filiales, dépasserait les 21 milliards selon les trois opérateurs eux-mêmes. Le calcul est simple : Altice veut au minimum cette valorisation totale, voire plus.
Les alternatives sur la table de Patrick Drahi
Le rejet rapide ne ferme toutefois aucune porte : le groupe de Patrick Drahi pourrait chercher à renégocier les termes, attendre une offre revue à la hausse, ou même explorer d'autres pistes de désendettement, y compris des cessions ciblées.
Plusieurs scénarios se dessinent. Altice peut jouer la montre en espérant que les trois opérateurs reviennent avec une proposition améliorée. Le groupe peut aussi négocier séparément avec certains acteurs, en fragmentant davantage SFR pour maximiser le prix de chaque morceau. Une troisième option consisterait à attirer un investisseur étranger prêt à payer plus cher pour prendre pied sur le marché français.
Selon Bloomberg, la valorisation du groupe pourrait grimper jusqu'à 30 milliards d'euros, dette comprise, et plusieurs acteurs comme Emirates Telecommunications Group et divers fonds d'investissement ont déjà montré leur intérêt.
Une audience d'appel sur le plan de sauvegarde accélérée est prévue le 4 novembre 2025 à Paris, ce qui pourrait modifier la donne. En attendant, Patrick Drahi garde la main. Son message aux trois opérateurs français est limpide : SFR vaut plus que ce que vous proposez. À vous de relancer ou de vous retirer.
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